la trace

    le tracé
d’un passage à tracer déposer par trace
inscrire son passage dans un lieu  c’est encore
avoir un geste archaïque       faire une entaille dans un rocher
tracer une ligne cicatrice à fleur de surface par la répétition des pas
griffoner une affiche    appuyer sa main sur un mur
déposer le sillon de son odeur          lâcher quelques phrases à dérouler
pisser dans quelques coins

la ligne    et le point  sur la ligne

regarder la ligne de train et son tracé en Europe
les gares / les villes sont des petits tas de points    petits tas qui se noircissent          deviennent points opaques           pôles d’attractions fixations
la carte regarder la ligne sur la carte
sur différentes cartes    regarder  suivre des yeux le tracé
regarder encore chaque jour la ligne les points     regarder  regarder         la ligne
au bout de combien de temps passé devant une carte le tracé d’une ligne s’imprime-t-il dans la rétine au point de pouvoir le suivre à l’aveugle ?

la ligne n’est pas nécessairement une droite

          courbures et autres détours

Cracovie est une ville courbe  cercles concentriques   boucles
plusieurs cercles   reliés et emboïtés les uns dans les autres

j’avais en moi deux villes : Montréal et Tokyo
lignes droites  / perpendiculaires
labyrinthes  où la logique orthogonale me faisait me perdre
des villes du futur     au passé léger à peine déposé  villes en projections
et transformations permanentes

et   se trouver à Cracovie la vieille  temps long    de la vieille Europe
temps lourd de l’histoire  ville qui se tient bien dans ses vieilles pierres peintes
dans ses teintes délavées
villes qui exhibe sa décrépitude restaurée
retrouver ici le goût des ruines   des ruines en devenir  leur nuance familière

de l’appartement en bordure du 2e cercle, partir marcher dans la ville
converger inconsciemment sans y faire attention au centre sur la grande place du Rynek
converger au centre puis tourner et me retrouver et dans les courbes trouver son chemin sans effort
cette ville a une circularité convergente

faire des cercles dans la ville semble être la trajectoire naturelle de mon corps

végétations libres  avec le printemps
herbes hautes et  trottoirs en mouvements traversés de failles et fissures

Cracovie et ses courbures      et Copernic
et les rails du tram encerclant la ville  les rails et leur courbes
les fils électriques    on lève la tête
et le ciel est cartographié

et à Cracovie rencontrer Seiji Shimoda, performeur japonais
et des performeurs québécois

Copernic et la courbure de la Terre
sa rondeur          et les lignes courbes de la ville
une ville ronde

c’est une ville en forme de cercle, en allant tout droit on ne se perd pas mais on revient à l’endroit d’où l’on est parti enfin presque juste un peu à côté on y revient on tourne et cela continue de faire tourner la ville sous nos pas en forme de cercle on avance on avance on ne se retrouve jamais complètement au même endroit juste légèrement décalé du point de départ et l’on continue de marcher tout droit on tourne on fait tourner nos pas en cercle on va tout droit tout droit on tourne et le cercle se rétrécie ou s’agrandit et la ville est toujours circulaire avec une place au centre une ville de lignes courbes pour marcher tout droit tout en tournant une ville où ce qui nous semble une trajectoire droite est une courbe car une ligne n’est pas nécessaire une droite on marche et cela continue de tourner une ville dont le centre est un pôle de gravité autour duquel se forme une circulation convergente vers ce centre  on marche et cela tourne tout tourne en soi car la ville est une spirale

lorsqu’on se déplace dans une ville, suit-on plus de lignes courbes que de lignes droites ?

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